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Le Politique n’est pas l’exemple parfait d’un type politique, mais bien plutôt l’illustration politique de ce que signifie « raison d’État » de soi-même, c’est-à-dire d’un modèle individuel de conduite. Par là, Le Politique est « moins un traité politique de l’art de gouverner qu’un traité du gouvernement de soi qui fait de Ferdinand le Catholique le plus parfait et le plus grand des rois ». Autrement dit, s’il n’y a pas de différence de nature entre les qualités héroïques et politiques, mais seulement « une nuance qui découle de leur sphère d’application », c’est précisément parce que le champ politique d’application n’est jamais que la partie d’un tout que l’on peut nommer éthique.
On comprend dès lors pourquoi le sujet politique ne peut qu’être une fiction, « un méta-Sujet épuré de ses subjectivités » : l’idée d’une « raison d’État » de soi-même est l’expression de cette « pensée individualiste » pour laquelle « chacun est comme un État, indépendant, enfermé en soi-même et concurrent des autres ». Gracián effectue ainsi un renversement de la relation du politique à l’éthique, par un déplacement de la verticalité traditionnelle du rapport du prince à ses sujets vers l’horizontalité des relations interindividuelles.
L’œuvre de Baltasar Gracian, écrivain jésuite, que l’on peut rattacher à celles de Machiavel et de Castiglione, est l’une des plus représentatives du baroque espagnol du Siècle d’Or. Aujourd’hui classée sous l’étiquette du «conceptisme», esthétique littéraire initiée par Luis de Gongora, elle est pleine de doubles sens et de jeux de mots, et fourmille de traits psychologiques pleins de vérité et de piquant. L’auteur en a laissé la théorie dans son "Art et figures de l’esprit", qui fut le code de la vie littéraire espagnole jusqu’à la fin du XVIIe siècle. Mais ses ouvrages ont aussi exercé une grande influence en Europe sur un plan philosophique, inspirant notamment les moralistes français (La Rochefoucauld), Voltaire, puis, au XIXe siècle, Athur Schopenhauer et Friedrich Nietzsche. Plus récemment, Vladimir Jankélévitch, Jacques Lacan et le situationniste Guy Debord ont lu avec passion son traité sur L’Homme de Cour, intitulé originellement Oracle manuel et Art de la prudence, qui reste d’une modernité brûlante. L’ouvrage rassemble quelque trois cents maximes sur l’art de la courtisanerie. Au-delà des préceptes politiques individuels, c’est une profonde réflexion sur l’art de se gouverner soi-même, et plus généralement sur la condition humaine et mondaine.
Titre : L'homme de cour
EAN : 9782824901015
Éditeur : République des Lettres
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